La privatisation du renseignement américain

L’« externalisation » ou la « privatisation » de la sécurité n’est pas un phénomène nouveau, surtout aux Etats-Unis mais il s’est largement développé à l’orée du nouveau millénaire et devint particulièrement visible à partir de 2003 avec la guerre en Irak. Plusieurs « bavures », dont celle concernant la société Blackwater [la plus connue des sociétés de sécurité privées, désormais rebaptisée Xe Services LLC], permirent d’en mesurer l’ampleur.
En 2008, on estimait qu’entre 20 000 et 30 000 personnels armés étaient employés par des sociétés de sécurité privées (ou SMP pour « Sociétés militaires privées ») en Irak, pour le compte du gouvernement américain. Et ce chiffre atteindrait même 180 000 pour l’ensemble des contrats passés par le Pentagone et le Département d’Etat avec ces mêmes entités privées dans le monde.
Mais on sait à présent que cette tendance touche également les agences de renseignement américaines de façon importante et que le cœur de la sécurité nationale n’est donc pas « à l’abri ».
Une enquête menée par le Washington Post [1] sur l’architecture de sécurité nationale mise en place après le 11 septembre 2001, estime que 265 000 des 854 000 personnes ayant accès à des informations ultraconfidentielles sont aujourd’hui des contractants privés. L’exemple de la CIA – institution dont le rôle est de faire à l’étranger ce qu’aucune autre agence américaine n’a le droit de faire – est à ce titre particulièrement frappant.
Ce qui était censé au départ être une solution provisoire mais qui est devenu avec le temps une habitude problématique ne risque-t-il pas de compromettre la maîtrise du gouvernement sur l’une de ses activités les plus sensibles ? L’État fédéral emploie-t-il trop d’agents attachés à des intérêts privés plutôt qu’au service du public ?
Le constat fait et les questions soulevées ici ne concernent que les États-Unis et tous les experts s’accordent à reconnaître que la privatisation ne déborde pas en Europe où les services officiels gardent la main sur les fonctions régaliennes. Mais le cas américain n’en est pas moins influent et riche d’enseignement.


Rappel Historique :

Selon Raphael Ramos [2] , le renseignement privé « …remonte aux origines de la nation américaine […] ainsi durant la Guerre d’Indépendance, le Général Georges Washington eut recours à de nombreux réseaux d’espions civils. De même, au XIXème siècle, la société du célèbre Allan Pinkerton menait des activités d’espionnage pour le compte du gouvernement américain » [3]..
Mais au 20ème siècle, la professionnalisation a considérablement réduit cette pratique, laquelle ne reprit qu’ à partir des années 90 avant de connaître une véritable explosion au lendemain du 11 septembre 2001, dans le cadre de la guerre contre le terrorisme décidée par le gouvernement de George W Bush et le Congrès. Plus de neuf ans plus tard, Barack Obama est installé à la Maison-Blanche et plus personne n’ose affirmer que le privé est financièrement avantageux. Le gouvernement s’est fixé pour objectif de réduire de 7 % en deux ans le nombre de sous-traitants. Pourtant, près de 30 % des effectifs des services de renseignements viennent donc encore de sociétés privées.


Privatisation du renseignement : une tendance lourde

L’externalisation du renseignement : davantage qu’une simple tendance, une réalité.Les données chiffrées ne sont pas aisées à obtenir car les activités de renseignement sont par essence secrètes et plus encore aujourd’hui très nébuleuses, y compris en interne : ainsi, tout dénombrement s’avère impossible et R.Gates, l’actuel secrétaire à la Défense des Etas-Unis a déclaré, en faisant référence aux civils du Pentagone : « C’est une terrible constation, je n’arrive pas à obtenir de chiffres précis sur le nombre d’agents contractuels qui travaillent pour le bureau du ministère de la Défense ».
Cependant, près de 70% du budget de la communauté américaine du renseignement serait consacré à des entreprises privées et l’estimation selon laquelle ces dernières seraient plus de 1900 a fait l’objet d’une validation en haut lieu : parmi elles, 533 (soit1/4) sont nées après le 11 septembre et les autres, qui existaient déjà, ont alors connu un développement rapide.
Cette réalité est généralisée à l’ensemble des agences américaines, mais elle affecterait encore plus celles spécialisées dans le renseignement technique, un domaine d’activité très onéreux, où l’intervention d’acteurs privés est en mesure de décharger les gouvernements d’une partie des coûts de fonctionnement :

• La National Sécurity Agency (NSA) a signé en 2001 un contrat de plus de 2 milliards de dollars avec des contractants privés et pour une durée de 10 ans, portant sur les technologies de l’information et de communication : elle travaillait naguère avec un petit vivier d’entreprises mais aujourd’hui, elle emploie au moins 484 sociétés et continue à en recruter d’autres afin de lui fournir la plupart des innovations qu’elle utilise pour mener ses opérations de surveillance électronique dans le monde entier.

• La moitié des 14 000 employés de la National Geospatial-Intelligence Agency (NGA) est issue d’acteurs extérieurs au gouvernement.

• Le Bureau national de reconnaissance (National Reconnaissance Office, NRO), chargé des programmes de satellites-espions américains, ne peut plus faire fonctionner ni entretenir son système de surveillance de pays comme la Chine, la Corée du Nord et l’Iran sans les quatre grandes entreprises avec lesquelles il travaille.

Mais l’externalisation vise également le renseignement humain. Citons quelques exemples :

• La Counterintelligence Field Activity (CIFA) consacrerait de l’aveu même de son directeur, près de 70% de ses crédits à de la sous-traitance.

• En mai 2007, des juristes de la DIA indiquaient que plus de la moitié du personnel de l’agence provenait de sociétés privées.

• La Central Intelligence Agency (CIA) est elle aussi largement et symboliquement concernée, puisque environ 10000 de ses postes (soit 1/3 de ses effectifs) sont alloués à des contractants privés, souvent d’anciens militaires ou agents des services qui ont quitté la fonction publique pour travailler moins et gagner plus, tout en percevant leur retraite de fonctionnaire.
A noter que la proportion monte à près de 75% pour sa cellule Pakistanaise d’Islamabad.

• Le Department of Homeland Security (DHS) dispose d’autant de contractants que de fonctionnaires fédéraux, son bureau chargé du renseignement employant même 60 % de privés. Il dépend de 318 entreprises privées pour ses services de base et son personnel, avec notamment 19 cabinets de recrutement qui lui permettent d’embaucher encore davantage par cette voie.

Le secteur privé s’est rendu à ce point indispensable que, sans sa collaboration, d’importantes missions militaires et de renseignement seraient sérieusement compromises.
L’essor est net mais quelles en sont les raisons ?

L’« explosion » amorcée par le 11 septembre 2001.

L’évolution de l’externalisation est à rattacher à celle du monde après la chute du mur de Berlin. La fin du contexte stratégique issu de la Guerre Froide engendre dans un premier temps un « vide »…une sorte de « pacification globale » est escomptée si bien que les pays réduisent leurs budgets de Défense. Ainsi aux Etats-Unis, entre 92 et 96, les effectifs du Département de la Défense ont diminué de 16% et ceux de la CIA de près de 25% en 10 ans, les agences de renseignement étant elles aussi impactées par ses restrictions financières.
Pour autant, elles continuaient d’être sollicitées par le gouvernement américain, leur activité ne baissait pas, au contraire : les demandes en renseignements, de même que les attentes, demeuraient toujours très élevées, notamment pendant la guerre du Golf. Les agences devaient faire donc aussi bien, mais avec moins de moyens. Pour faire face à cette problématique, les agences américaines se sont tournées pour la première fois vers des acteurs privés.
Mais, c’est le 11 septembre qui va transformer ce recours conjoncturel en une réalité bien marquée, en faisant exploser la part des acteurs privés au sein des activités de renseignement pour le gouvernement.
Les agences américaines doivent répondre non seulement aux besoins de renseignements pour se prémunir contre une nouvelle attaque sur leur territoire, mais également à ceux des forces militaires actives en Afghanistan, puis en Irak, ou encore dans toutes les régions du monde ou les américains sont militairement engagés (contre le terrorisme islamiste).
L’augmentation du budget de la communauté américaine de renseignement est insuffisante compte tenu de la multiplicité et du volume des besoins et c’est par ce biais que le gouvernement de George W. Bush a laissé cartes blanches à la CIA ainsi qu’ aux autres organismes impliqués dans la lutte contre le terrorisme pour recruter plus de prestataires que de fonctionnaires. L’ intention était de limiter le nombre des salariés permanents de l’État et d’embaucher plus rapidement que ne le permettait le dispositif fédéral (plutôt lent) et surtout à ce que l’on pensat être - bien à tort - à moindre coût.
C’est dans ce contexte que l’externalisation vers le secteur privé s’est imposée et réalisée de façon quasi-mécanique et avant tout pour des raisons budgétaires.
Mais indéniablement, elle fut favorisée par deux autres facteurs :

La mutation « technologique » du renseignement : antérieure à la « guerre contre le terrorisme », elle a généré une hausse considérable de l’utilité des renseignements électromagnétiques ou d’origine image. Si les agences gouvernementales, en premier lieu la NSA, engagent de lourdes dépenses pour s’adapter, pour acquérir et mettre à jour ces nouveaux systèmes, le développement concomitant des « Start-up », désireuses de passer des contrats avec le gouvernement va faire naître une convergence d’intérêts et leur permettre de mieux supporter cette mutation technologique. Et il en sera de même quelques années plus tard, avec le développement d’Internet et du renseignement issu des « sources ouvertes », des acteurs privés sont venus palier le manque de linguistes ou traducteurs dans les agences gouvernementales de renseignement et ce, d’autant plus que le renseignement de sources ouvertes ne nécessite pas d’habilitation de sécurité, contrairement aux autres types de renseignement.

L’absence de réforme : en effet, faire appel à des acteurs extérieurs qui « composent » les activités des agences gouvernementales, permet premièrement à ces mêmes agences de limiter les mesures de changements et deuxièmement de « compenser » l’activité des agences gouvernementales quand ces dernières ne parviennent pas - même lorsqu’elles le veulent - à faire évoluer leurs pratiques (ou quand elles ne le font pas assez vite). C’est donc un moyen de contourner la réforme ou d’éviter de faire évoluer trop radicalement un mode de fonctionnement parfois hérité de plusieurs décennies de pratique. Faire évoluer de telles machines bureaucratiques n’est pas chose aisée. En recourant à des entreprises privées, l’Etat s’adapte au nouvel environnement, mais sans passer par des réformes coûteuses et souvent décriées. Le secteur de la sécurité privé ne vend pas seulement des moyens techniques, il représente les réserves des services de renseignement en leur offrant une flexibilité, une expertise qu’ils ne peuvent acquérir. Les contractants privés sont donc aussi de la matière grise : ils conseillent, font des rapports et interviennent partout où l’on a besoin d’eux.
Le recours systématique à des technologies toujours plus sophistiquées et onéreuses de conception a poussé les services gouvernementaux à multiplier les contrats avec une multitude d’entreprises privées, lesquelles à la faveur du 11 septembre et du flux de l’argent public qui en a découlé se sont diversifiées et organisées à coup de rachats, de créations, de capitalisations etc.
Aujourd’hui, dans une architecture de sécurité nationale devenue très complexe et inefficace, le renseignement privé avec ses « contractors » constitue lui même une immense galaxie : 800 entreprises sont spécialisées dans les technologies de l’information mais les autres n’inventent rien, se contentant de faire le travail normalement conduit par des fonctionnaires. Nombre d’entre elles sont dirigées par des "ex" des services qui savent exactement à quelles portes frapper pour obtenir des contrats et elles sont 110 à se partager 90 % du marché.


L’externalisation du renseignement : conséquences à « double tranchant ».

Depuis le 11 septembre 2001, les contributions des sous-traitants – mais aussi leurs méfaits – ont modifié le cours de l’Histoire et brouillé les frontières entre un agent ayant juré de servir son pays et un salarié du privé simplement pourvu d’un badge. Les sites Internet des sociétés privées affichent sur leur pages d’accueil des slogans du type « Fiers de servir » ou encore « Préserver la liberté » qui font qu’il est difficile de les différencier des activités ou missions gouvernementales. Au-delà, quand bien même ces contractants privés sont « un puits sans fonds » comme les a récemment qualifiés R.Gates, « nous les considérons comme les nôtres » a précisé le directeur des ressources humaines au Bureau du Directeur du renseignement (Office of the Director of National Intelligence, ODNI).
Difficile de dissocier leur apport et utilité réelle de la dépendance, si ce n’est totale en tout cas importante, à laquelle doit faire face le gouvernement à l’égard de la privatisation.
La grande diversité des moyens et des sources qu’elle offre ne peut à priori qu’être profitable et « Ré-internaliser » le renseignement semble désormais inenvisageable. La plupart des responsables d’institutions à l’instar de celui du renseignement naval (Office of Naval Agency) avancent que, face à la surabondance des données à intercepter, collecter, analyser, classer, recouper etc à l’échelle mondiale, les services ne pourraient désormais plus fonctionner sans les sous traitants.

Mais divers éléments tangibles sont toutefois à prendre en considération et ils sont de nature à démontrer qu’il est indispensable de stopper le courant, voire de faire marche arrière comme le souhaite l’administration d’Obama et au minimum, il convient de construire un partenariat efficient, de qualité et impérativement contrôlé, entre public et privé :

• L’apport de ces acteurs privés dissuade les agences gouvernementales de se réformer, ou du moins empêche que ces réformes se fassent en profondeur. En effet, l’externalisation est désormais une alternative pouvant pallier les insuffisances des agences. En ce sens elle devient une solution de facilité qui masque la nécessité de bousculer certaines habitudes, un frein à la volonté.

• Les employés de ces sociétés, contrairement aux fonctionnaires des agences étatiques, ne sont pas tenus de rendre des comptes et on peut craindre, pour cette raison, que le gouvernement leur confie des missions « sensibles » telles que l’interrogatoire de prisonniers. Ceci a déjà eu lieu et ce, non sans graves conséquences : les mauvais traitements infligés aux prisonniers d’Abou Ghraib, auxquels ont participé des contractants privés, ont allumé un désir de vengeance qui couve encore et ces dérives viennent nourrir une fois de plus le sentiment anti américain.

• Si ces sociétés sont de bons sous-traitants pour les agences, elles peuvent devenir également de sérieuses concurrentes. En effet, de plus en plus de membres expérimentés de la communauté du renseignement quittent les agences étatiques telles que la CIA pour rejoindre le secteur privé ou les rémunérations sont beaucoup plus avantageuses. C’est ce que l’on nomme la « fuite des espions » et elle est importante car l’effectif de certains acteurs privés est composé quasi exclusivement d’anciens membres des agences gouvernementales. Et c’est d’ailleurs pour la contrer que la CIA interdit aux entreprises avec lesquelles elle est en contrat de lui proposer des personnels ayant quitté la CIA depuis moins de dix-huit mois.

• Ce différentiel de rémunération peut incontestablement avoir un effet négatif sur le moral des employés des agences qui constatent que ceux du secteur privé gagnent davantage alors qu’ils effectuent le même type de tâches, sans compter qu’il y a des forts soupçons de corruption et de surfacturation généralisée.

• Mais le fait qu’un fonctionnaire coûte - au bas mot - 25 % moins cher, pose également la question du coût réel pour le gouvernement de cette externalisation. Certes, par ce biais l’Etat fait d’importantes économies surtout parce qu’il n’a pas à payer les pensions de retraites des employés du privé. Cependant la Commission du Sénat sur le Renseignement a démontré qu’un fonctionnaire revenait à 126 000 dollars par an à l’Etat, contre 256 000 dollars pour un employé extérieur. En outre, un rapport publié en 2008 par l’ODNI révèle que les contractants privés représentent 30 % des effectifs des sevices secrets mais absorbent 50 % de leurs coûts de personnel, un différentiel aussi parlant qu’abérant financièrement.

L’externalisation du renseignement s’avère donc à « double tranchant ».
Sur le terrain opérationnel, ce bon complément aux activités des agences gouvernementales, peut indéniablement constituer aussi un « danger » pour leur(s) activité(s).
Au plan financier, économique et même politique, le clivage est tout aussi évocateur : avec ce système qui échappe à tout contrôle, les États-Unis dépensent trop d’argent pour le retour sur investissements qu’ils obtiennent mais c’est un secteur hautement rémunérateur pour des compagnies privées, de surcroît essentiellement créées par des anciens, avec l’argent du contribuable , et qui sont plus préoccupées par faire de l’argent que par le pays.


Perspectives futures

Contrôler l’externalisation du renseignement.Devant un phénomène d’externalisation et de privatisation si répandu qui d’un côté est porteur de bénéfices substantiels mais qui d’un autre, en raison de l’emballement de la machine, expose à de grands dangers et atteint un degré d’exubérance difficilement concevable, il devient nécessaire et urgent d’instaurer des méthodes de maîtrise et de contrôle.

Définir un cadre légal.Une première piste consiste en la mise en place d’un cadre législatif clair et respecté qui régirait scrupuleusement l’externalisation des activités du renseignement. Si celle-ci est aujourd’hui si importante aux États -Unis, si des gens ont eu et ont encore un intérêt financier et personnel à la voir se développer, c’est en grande partie due à la « faiblesse » de la législation. Par deux fois avant 2001, il y a bien eu une volonté d’encadrement mais une volonté non réellement transformée :

- En 1981, une directive présidentielle entérina la possibilité pour les agences gouvernementales du renseignement de passer des contrats avec des sociétés privées dans certaines conditions. Elle prévoyait que les « fonctions inhérentes au gouvernement » devaient rester l’apanage des employés fédéraux, et que les activités relevant de « l’action de gouverner » et impliquant « l’intérêt publique » ne pouvaient être externalisées. Mais en laissant le soin aux agences de déterminer elles mêmes quels domaines de leur activité pourraient être sous traités, et lesquels ne le pourraient pas, elle auto- limita de fait sa portée.

- De même, en 2000, un mémorandum du Pentagone chercha à clarifier la situation en indiquant que le renseignement tactique était par essence du ressort exclusif du gouvernement et que, compte tenu de leur importance pour la sécurité nationale, les activités relevant du renseignement stratégique ou opérationnel devraient elles aussi être « fermées » aux acteurs privés. Mais dans le même temps, ce document autorisait le recours à des sous traitants dans les cas où les moyens fédéraux s’avéraient insuffisants. Là encore, la porte de l’externalisation restait entrouverte.
De toute évidence - et les nombreuses « bavures » ou « dérives » survenues en Irak du fait de certains de ces acteurs privés l’ont démontré - il est nécessaire d’élaborer une législation bien plus claire et approfondie. Des travaux du Département de la Défense sont d’ailleurs en cours pour permettre une évaluation complète de la problématique. Mais pour le moment, aucun cadre légal ne définit aux Etats-Unis quelles activités peuvent être concernées par l’externalisation et selon quelles modalités.

Contrôler l’externalisation par le bais « parlementaire ».Le contrôle parlementaire du renseignement est indispensable pour encadrer et surveiller les activités des agences gouvernementales, mais il l’est d’autant plus lorsqu’il s’agit d’activités de renseignement menées par des acteurs privés. Et la aussi, on constate un « vide » en matière de mécanismes de contrôle. Aujourd’hui, et contrairement aux fonctionnaires du « public », les employés privés ne sont donc pas tenus de rendre des comptes sur leurs pratiques. Les autorités américaines semblent avoir pris conscience de la chose et ainsi, en 2007, le Congrès à décidé par le biais de la loi de financement du renseignement, que pour l’année 2008, les agences de renseignement seraient contraintes de faire état des activités qu’elles ont externalisées et des coûts engendrés.

Ce n’est qu’avec la définition et le respect d’un nouveau cadre légal ainsi que le renforcement du contrôle parlementaire que le secteur privé représentera(it) un réel apport pour les agences de renseignements fédérales, et qu’il pourra(it) être envisagé comme une contribution positive à l’Amérique « top secret ».


Source
Enquête du Washington post publiée le 22 juillet 2010 après 2 ans de travail et d’investigation (par Dana Priest et William Arkin) : http://projects.washingtonpost.com/top-secret-america/articles/national-security-inc/

[1Washington Post, A hidden world, growing beyond control, 19 juillet 2010.

[2Chercheur à l’ European Strategic Intelligence and Security Center (ESISC)

[3Raphael Ramos, Externalisation du renseignement : l’exemple des Etats-Unis, European Strategic Intelligence and Security Center (ESISC), Décembre 2007, 10p